Haïti/République Dominicaine : Le dialogue binational dans l’impasse

Le Groupe d’Appui aux Rapatriés et Réfugiés (GARR) se sent grandement préoccupé de l’avenir du dialogue enclenché depuis le début de l’année 2014 entre Haïti et la République Dominicaine. Il s’inquiète d’autant plus de l’issue de ces pourparlers lorsqu’il se réfère surtout à la 3^ème rencontre binationale prévue pour le 6 mai 2014 qui vient d’être une fois de plus reportée au 8 mai prochain.

Ce quatrième report renforce le doute qui planait sur l’issue de ce dialogue où les deux acteurs tendent à mettre de côté les problèmes cruciaux de droits humains entravant les relations de bon voisinage entre les deux peuples de l’île au profit d’autres sujets non prioritaires comme la santé, le tourisme et le commerce.

Cela s’apparente à une stratégie pour faire passer le temps alors que, d’un côté, des milliers de Dominicains/Dominicaines d’ascendance haïtienne continuent de souffrir du retrait de leur nationalité suite au prononcé de l’arrêt TC 168/13, le 23 septembre 2013 ; d’un autre côté, des immigrants-es haïtiens continuent de subir des violences de toute sorte sur le territoire dominicain sans que les coupables ne soient inquiétés. Le silence complice des autorités des deux pays les encourage à poursuivre leurs forfaits sur cette population extrêmement vulnérable.

Le GARR déplore, principalement, la passivité des autorités haïtiennes qui ne se montrent pas à la hauteur de leurs responsabilités dans ce dialogue dont les objectifs primordiaux devraient être l’amélioration des conditions de vie des travailleurs migrants haïtiens en territoire voisin et l’annulation pure et simple de la sentence raciste du Tribunal constitutionnel dominicain. Il critique le fait qu’elles n’exercent aucune pression sur les autorités dominicaines pour leur porter à envisager dans l’immédiat des mesures qui faciliteraient aux citoyens/citoyennes dénationalisés le recouvrement de leur nationalité.

Il convient de souligner que lors des deux précédentes rencontres, les autorités dominicaines s’étaient engagées à présenter devant le parlement dominicain une loi permettant de résoudre le grave problème d’apatridie, un phénomène qui est en train d’être combattu par les Etats du monde entier. Cependant plus de trois mois après la tenue à Jimani de la dernière rencontre, le 3 février 2014, aucun acte concret n’a été posé en ce sens par les autorités dominicaines. Ce qui laisse comprendre qu’elles n’ont pas de volonté réelle de surseoir au projet de génocide civil qui est en train d’être appliqué à l’encontre des Dominicains/Dominicaines d’ascendance haïtienne.

Le GARR félicite le Venezuela qui avait cru nécessaire de mettre sur une même table les autorités de l’île en vue de trouver une issue favorable aux graves problèmes de droits humains nés de la sentence raciste de la Cour constitutionnelle dominicaine. Il estime néanmoins que le rôle de facilitateur de ce pays ami lui fait obligation d’orienter les discussions vers la restitution de la nationalité aux victimes de l’arrêt.

Espérant que la 3^ème rencontre binationale annoncée pour le 8 mai 2014 va enfin avoir lieu, le GARR exhorte l’Etat haïtien à garder la tête haute dans les pourparlers qui doivent prendre en compte les questions migratoires. Il recommande une fois de plus que la société civile organisée des deux pays soit partie prenante des discussions.

En aucun cas, l’Etat haïtien ne doit pas se faire complice des autorités dominicaines en posant des actes susceptibles de faire le jeu du secteur « ultranationaliste » dominicain très hostile à la race noire et au peuple haïtien.

Les droits humains ne sont pas négociables. Au grand jamais, la nationalité des Dominicains/Dominicaines d’ascendance haïtienne ne doit pas être négociée contre quoi que ce soit.

Source : GARR Haïti