Théâtre: In Memoriam, de Jean-René Lemoine, à FOKAL
Dans le cadre de la commémoration du séisme du 12 janvier 2010, la FOKAL présente les 10 et 11 janvier 2019 à 6h PM,le spectacle « In Memoriam » de Jean-René Lemoine, mis en scène par Miracson Saint-Val.
Le spectacle est proposé par La Compagnie Bazou, avec des performances de Ketsia Vaïnadine Alphonse (La Mère) ; Ericka Jean Louis (La Fille), Lesly Maxi, Joseph Derilon Fils Dérilus, Staloff Tropfort (Le Chœur). L’entrée est libre dans la limite des places disponibles.
Une mère parle avec sa fille morte pendant le tremblement de terre du 12 janvier 2010. Une question lui transperce le cœur : « Quand est-ce que tu es morte ? » C’est la première phrase prononcée par cette mère qui n’arrive même plus à pleurer. Et sa fille, qui se souvient plus de grand-chose – « Je ne sais pas maman, c’est loin » -, demande des nouvelles de la famille et s’arme de courage pour porter/prendre les douleurs de sa mère. Un dialogue pesant qui balbutie entre souvenir de la tragédie et impuissance d’une mère dévorée par la solitude.
Au-delà du drame et de la mélancolie qui l’accompagne, l’espoir, comme un courant d’air frais, se faufile avec délicatesse dans le texte. « …Il est temps de recommencer à ne plus être malheureux… », dit la fille. Dans un style où les mots sont comme des pointes de couteaux, In Memoriam est une porte ouverte sur la parole encore étouffée du drame du 12 janvier.
Note du metteur en scène
« … Si on devait écrire tout cela dans un livre, on ne nous croirait pas. Nous sommes dans une telle solitude, une telle solitude… » Comment raconter le 12 janvier aujourd’hui ? Une plaie encore ouverte, où chacun garde sa tristesse et aiguise sa colère. Dans In Memoriam, l’auteur fait dialoguer la mère – vivante – avec la fille – morte. Pour appréhender ce phénomène dans lequel un Vivant parle avec un Mort, nous nous sommes référés au rituel Bo n’hou, le rituel funéraire des morts dans le vodou haïtien. Ce moment de voyage de ce monde vers Alada, lieu de vérité. Comme dans la tragédie grecque antique, un choeur témoin commente, déplore les malheurs de l’humanité, implore l’assistance des dieux/loas. Un choeur avec une résonnance artisanale, fait avec le son des mains qui s’échauffent, l’étoffe de la poitrine, la singularité de voix sèches, arides, fragiles, déterminés. Un choeur avec des chants vodou, racontant notre parcours sur cette terre et notre destination, chez Agwewoyo, maître des eaux.
Il y a quelque chose d’essentiel dans la conception de la mort dans le rituel vodou, c’est le courage demandé au vivant de laisser le mort faire le voyage. Le mythe dit qu’à chaque fois que l’on est triste, le mort/ la morte est à coté de nous. Pour qu’il/elle puisse s’en aller, il lui faut notre joie. Ce qui veut dire que toi, vivant, vivante, tu es prêt, prête à le laisser s’en aller, lui, elle, mort, morte. « Le deuil fait ». Aujourd’hui, neuf ans plus tard, n’est-il pas nécessaire d’appeler nos morts, nos mortes, de parler avec eux, puis les laisser partir et retrouver la paix ? N’est-il pas temps « de recommencer à ne plus être malheureux » ?
Miracson Saint-Val. Comédien, metteur en scène, directeur de la Cie Bazou et membre fondateur d’ADRECE. Il a été formé au Petit Conservatoire, Ecole de théâtre et des arts de la parole, dirigé par Daniel Marcelin et a suivi des stages au conservatoire royal de Liège, Ecole Supérieure d’ACTeur « ESACT » sous la direction de Pietro Varrasso dans le cadre du programme de recherche « Ethnodrame ». Il s’investit depuis dans la recherche théâtrale, particulièrement en lien avec le vodou. Il a aussi suivi une formation universitaire en psychologie à l’université d’Etat d’Haïti et en philosophie à l’Ecole Supérieure St Ignace.
En 2018, il a participé à l’atelier « Corps en démocratie », résidence de recherche sur la danse contemporaine, sous la direction du chorégraphe Jean Aurel Maurice. En 2017 et 2018, il a mis en scène et interprété « Chemins de fer », de Julien Mabiala Bissila, Prix RFI Théâtre 2014 ». Il a assuré les mises en scène de : « Abattoir » (2016-2017) ; « La Marche » de Bernard Marie Koltès (2015) ; « Sang Brides » de Ketsia Vaïnadine Alphonse (2015). Il a participé au Festival off d’Avignon 2014 avec la pièce « L’Épreuve de Virjilan », produite par la Cie Siyaj (Guadeloupe) dans laquelle il interprète le rôle de Majo Jon (personnage du rara).
Il a interprété les rôles de Jera dans « Jera ak Jèta », de Makenzy Orcel, mis en scène par Pascal Julio (2017) ; du Professeur dans « La Leçon », de Eugène Ionesco, mis en scène par Rolaphton Mercure (2017) ; de Almanno dans « Twoufoban » de Frankétienne, mis en scène par Johnny Posy (2013) ; de Gervilain dans « Gouverneurs de la rosée », adaptation du roman de Jacques Roumain mise en scène par Daniel Marcelin (2013/2014). Il a également joué dans « Le balayeur et la rose » en 2013 et « La dérive du roi » en 2009, co-mis en scène par Yannick Cochand et Fritz Evens Moise. Ces deux créations ont tourné en Suisse. Il a aussi participé à plusieurs lectures scéniques dont « Bahia de tous les saints » de Jorge Amado (2015), « De Villes Voi(e)x », mise en espace Daniel Marcelin, 2012 ; « En mémoire du géolibertinage » de René Depestre (2012), « Amour » de Marie Vieux Chauvet (2014). Il a joué au cinéma dans le court métrage « Les pleureuses » réalisé par Michel Marrion (2012).
Jean René Lemoine. Après un parcours d’acteur, Jean-René Lemoine se consacre essentiellement à l’écriture et à la mise en scène. Sa pièce Erzuli Dahomey a été créée en avril 2012 au Théâtre du Vieux Colombier par la troupe de la Comédie-Française dans une mise en scène d’Éric Génovèse. En 2014 il met en scène et interprète Médée poème enragé à la MC93 à Bobigny (reprise au Théâtre Gérard Philipe en mars 2015 et tournée au CDN de Châteauvallon et au TNS en 2016). En juin 2016 il a participé aux États Singuliers de l’écriture dramatique au théâtre l’Échangeur de Bagnolet. Son travail d’écriture et de création a obtenu de nombreuses récompenses : il est lauréat du prix SACD – Théâtre – pour L’Odeur du Noir, et de la Fondation Beaumarchais pour Chimères. L’Ode à Scarlett O’Hara obtient le Grand Prix de la Critique comme meilleure création de langue française pour la saison 1997-1998. Il a été plusieurs fois boursier du Centre national du Livre pour Erzuli Dahomey, Face à la mère, et Médée poème enragé, lauréat du Prix d’écriture théâtrale de Guérande pour L’Adoration, boursier de La Villa Médicis hors les murs pour son projet Archives du Sud, prélude à deux créations : La Cerisaie et Face à la mère, Lauréat du prix SACD pour Erzuli Dahomey. Face à la mère et Iphigénie ont obtenu l’aide à la création du Centre National du Théâtre. Iphigénie a obtenu en 2013 le prix Émile Augier de l’Académie française.
Ketsia Vaïnadine Alphonse. Comédienne, dramaturge, et maquilleuse, Ketsia Vaïnadine Alphonse est l’une des femmes de sa génération à s’adonner à l’écriture théâtrale. Plusieurs de ses textes sont lus et/ou mis en scène, « Sang Brides » présenté en 2015 à la Fokal ; « Lettre à Clau » à la 12e édition du Festival Quatre chemins et en Off au festival des Francophonies en Limousin en 2016, « Abattoir », co-écrit avec Joeanne Joseph et Lesly Maxi. Boursière de la résidence des Quatre chemins en 2016, elle a travaillé aux Gonaïves sur la problématique de la polygamie dans les lakou. En 2017, elle a joué dans plusieurs spectacles : « La Plaie, Monologue d’interdits » écrit et mis en scène par James St Félix ; « Pour les filles noires qui ont pensé au suicide quand l’arc-en-ciel suffit de Ntozake Shange mis en scène par Michèle Lemoine; « La Leçon », d’Eugène Ionesco mis en scène par Rolaphton Mercure ; « Jera ak Jèta » de Makenzy Orcel mis en scène par Pascale Julio.
Ericka Julie Jean Louis. Née en 1990, danseuse professionnelle, membre de compagnie Jean René Delsoin. Elle a travaillé avec plusieurs chorégraphes comme Jean Guy Saintus, Linda François. En 2017, sous la direction de Kettly Noël, elle a effectué un stage international de danse à Bamako (Mali) puis en théâtre avec Eva Doumbia. En 2018, elle a participé au festival de Taipei, « Nan ying International Festival 2018 ». En dehors de la danse, Ericka travaille aussi en chant et en théâtre. Chanteuse du groupe Siromiel, elle a joué dans « Erzuli Dahomey, déesse de l’amour » de Jean-René Lemoine, mis en scène par Eliezer Guérismé et dans « Le coin des amen » de James Baldwin, sous la direction de Jenny Cadet.
Lesly Maxi. Comédien, conteur, dramaturge et metteur en scène. Il a étudié le théâtre au Petit Conservatoire (Ecole de théâtre et des arts de la parole). Il a écrit et interprété quatre contes : « Danma », « Doremirako », David et « Chikata ». Il a également écrit plusieurs pièces de théâtre : « 35 Secondes », « Esclaves-Libres » ; « Confusion », « Hors Limite » ; « Mèt-Dam » (Audience) ; « Mitan Poto » . Il est co-auteur de la pièce « Abattoir ». Il a aussi fait l’adaptation au théâtre de « Dix Hommes Noirs » et « Un Geste, des Vies ».
Staloff Tropfort. Responsable de choeur dans « In Memoriam », il est comédien, conteur, photographe, diplôme en théâtre à l’Ecole Nationale des ARTS (ENARTS). Il a aussi été formé en Belgique au Conservatoire royal de Liège dans le cadre du projet Ethnodrame sous la direction de Pietro Varasso. Directeur de l’association ADRECE, il s’investit dans un travail de recherche (Ethnodrame) en se référant aux recherches de Franck Fouché et au travail de Jerzy Grotowski. Il se base sur des formes et des champs d’énergies fonctionnelles et émotionnelles qui existent chez l’haïtien. Son principal matériel de travail est le vodou et certains éléments constituant le rituel tels que la danse, le chant, la musique, les couleurs, etc.
Joseph Derilon Fils Dérilus. Comédien, conteur et scénographe. Diplômé en Art Dramatique à l’Ecole Nationale des Arts (ENARTS). Assistant technique au Festival Quatre chemins. Membre fondateur de la Cie LOBO et de « Klèb Kilti- Rèl (KK-Rèl » dans sa ville natale, Verrettes. De 2011 à 2014, il a été le responsable artistique de la foire du livre « Verrettes a la découverte du livre « . En 2017, il a joué dans « Abattoir », mise en scène de Miracson Saint-Val, et dans « Anatole » de Félix Morisseau Leroy mis en scène par Billy Elucien. En 2018, il a joué dans « Rèv Boukannen » écrit et mis en scène par Joeanne Joseph.
Jean Ronald Pierre. Créateur de lumière et marionnettiste, Jean Ronald Pierre a travaillé au ministère de la Culture pendant six ans comme éclairagiste. Il a été assistant technique et remplaçant de Duquel Lafalaise dans le projet « Opera Lenglensou » en 2005. En 2006 et 2007, il a travaillé pour la Quinzaine de la francophonie. En 2007, il intègre la compagnie Musique des Antilles de Jean Claude Verdier ou il passe quatre ans. Depuis 2014, Jean Ronald Pierre est directeur technique du festival Quatre chemins. De 2017 à nos jours, il est régisseur général du festival « En Lisant » dirigé par Eliezer Guérismé. En 2017, il a créé avec Richard Domin les lumières de l’exposition “Lutter pour l’humain”, conçue par Michèle Lemoine. En 2018, il collabore encore avec elle pour la création spectacle « Corps et démocratie » créé par le chorégraphe Jean Aurel Maurice. En avril 2018, il crée les lumières du spectacle « Epilogue d’une trottoire » mis en scène par Louisna Laurent. En 2018 ilest régisseur général du festival PAPAP dirigé par Kettly Noël. Il travaille comme éclairagiste sur la tournée nationale du spectacle « Chemins de Fer » mis en scène par Miracson Saint-Val, avec lequel il participe aussi à la 14e édition du Festival international de théâtre du Bénin (FITHEB). Il est aussi régisseur du spectacle « Nos Plus belles années » mis en scène par Florence Jean Louis Dupuy.
La Rédaction
Contact : actualites@haitinews2000.com
Discover more from Haitinews2000 | Haiti News - Nouvelle Haiti - Haiti Actualités Politiques
Subscribe to get the latest posts sent to your email.