Drame à l’orphelinat « église de la compréhension de la bible » de Fermathe 55 Une chaine d’irresponsabilités qui méritent d’être sanctionnées
Nous, citoyens et citoyennes engagés dans la Promotion et la Défense des droits de la Personne, membres du mouvement « Partenaires pour la Citoyenneté Engagée en Haïti » (PCEH), avions accueilli avec un sentiment de révolte et de dégoût la triste nouvelle du décès de 15 enfants, dont 2 morts carbonisés et les autres suffoqués, dans l’incendie survenue à l’Orphelinat «Eglise de la Compréhension de la Bible » à Fermathe 55, dans la nuit du 13 février 2019. Les deux enfants carbonisés vivaient avec un handicap : Un était un handicapé moteur et le second vivait avec une déficience intellectuelle.
Malgré les chiffres publiés, nous avons des doutes quant au nombre exact d’enfants qui auraient péri dans cette tragédie, car L’Institut du Bien-Etre Social et de Recherche (l’IBESR), institution de supervision des orphelinats dans le pays, n’a encore rendu publique aucune information à ce sujet. Combien d’enfants se trouvaient à l’orphelinat ? Combien ont été secourus ? Où se trouvent-ils exactement ? Ces informations ne sont pas encore disponibles.
Les rumeurs font état de chiffres différents sur le nombre d’enfants qui se trouvaient dans l’orphelinat et les informations sur ce qui est advenu des enfants dont les corps n’ont pas été retrouvés ne sont pas du tout claires.
Nous citoyens, citoyennes engagées pour la promotion et la défense des droits de la personne en Haïti, réclamons une investigation sérieuse et rapide pour savoir où sont passés les enfants qui se trouvaient à l’Orphelinat « Eglise de la Compréhension de la Bible » et dont les corps n’ont pas été retrouvés.
Nous exigeons des autorités la fourniture rapide de moyens pour une prise en charge des enfants qui sont encore à l’hôpital, ceux et celles qui se trouvent au centre de transit de l’IBESR, l’organisation de funérailles dignes pour ceux et celles qui ont péri et des moyens de réinsertion des survivants dans leurs familles biologiques ou dans des familles d’accueil.
Nous profitons de la circonstance pour rappeler un principe fondamental des Droits Humains qui est celui de la RESPONSABILITÉ, tant de l’Etat que de la société civile. Cette tragédie survenue dans cet orphelinat met en évidence toute une chaine d’irresponsabilités que nous dénonçons et mettons en évidence dans cette note.
1) Irresponsabilité de L’Institut du Bien-Etre Social et de Recherche (IBESR). Cette institution publique attachée au Ministère des Affaires Sociales a le mandat de contrôler dans quelles conditions fonctionnent les centres d’hébergement d’enfants. Comment comprendre que cet orphelinat ait pu continuer à fonctionner au vu et au su de tout le monde jusqu’à ouvrir un second centre à Thomassin 32, alors que depuis 2017, une évaluation et documentation réalisée avait donné un avis défavorable le concernant. Qu’est-ce que l’IBERS avait fait pour prévenir une telle catastrophe ?
2) Irresponsabilité de l’Orphelinat en tant qu’institution. En choisissant de prendre sous leur garde des enfants, les responsables de l’Orphelinat, qu’ils aient eu ou non la reconnaissance de l’Etat, ont l’obligation morale de prendre soin de ces mineurs, de les protéger, d’avoir un minimum de moyens disponibles pour cette prise en charge et une équipe suffisante et entrainée. Cet horrible incident dans l’orphelinat a tout l’air d’une grande négligence. Les dirigeants de cette institution ainsi que tout le personnel ont une grande responsabilité dans ce qui s’est passé et doivent rendre compte par-devant la justice de leur négligence
3) L’irresponsabilité du personnel de service, le soir de la tragédie. Il y a eu quelqu’un qui a pris la responsabilité d’allumer la bougie et de la placer quelque part sans se soucier des risques. Il devrait y avoir des gens de service ce soir-là pour la garde des enfants. La personne qui a allumé la bougie ainsi que celles qui se trouvaient sur les lieux sont tout aussi responsables de ce qui s’est passé. Elles doivent être recherchées et poursuivies correctement pour négligence grave.
4) Irresponsabilité de l’Etat face à son obligation de garantir les droits des enfants. Certains des enfants qui se trouvaient à l’orphelinat ont des parents. Mais ces derniers, en raison de leur pauvreté extrême, ne pouvaient pas prendre soin de leurs progénitures. La mort de ces mineurs vient nous rappeler l’obligation de l’Etat de prendre les mesures nécessaires pour que tous les enfants aient un minimum de sécurité sociale, qu’ils trouvent à manger quotidiennement, qu’ils aient accès à l’éducation, à un lieu décent pour être logés, etc. L’article 3 de la Convention relative aux Droits de l’Enfant, ratifiée par l’Etat Haïtien en décembre 1994 stipule :
« Les Etats parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toute les mesures législatives et administratives appropriées » (Article 3, alinéa 2).
Les Etats parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié », (Article 3, alinéa 3).
En droits humains, le principe de la RESPONSABILITÉ exige que chaque personne accomplisse les tâches qui lui incombent, respecte son mandat et assume les conséquences de toute négligence ou non-accomplissement de ses responsabilités. En vertu de ce principe, nous, citoyens et citoyennes engagés, exigeons les sanctions appropriées contre: les responsables de l’IBESR qui n’ont pas fait leur travail, les responsables de l’orphelinat et les employés qui se trouvaient de service à l’orphelinat le soir de la tragédie.
Nous présentons nos sincères condoléances aux parents de ces enfants et réclament pour eux de la part des organisations d’assistance légale un accompagnement juridique afin que justice soit faite pour les victimes.
Fait à Port-au-Prince, le 18 février 2020.
Ont signé cette note, les personnes suivantes, coaches et éducatrices en Droits Humains, membres du mouvement « Partenaires pour la Citoyenneté Engagée en Haïti (PCEH) » et membres de plusieurs organisations de droits humains :
Colette LESPINASSE, PORT-AU-PRINCE
Jocelyne COLAS, PORT-AU-PRINCE
Mitchell Scipion ADOLPHE, PORT-AU-PRINCE
Vitaléme ACCÉUS, (CASODI, CROIX-DES-BOUQUETS)
Michelet OBEISSANT (LAKOU TIMOUN)
Jetho PIERRE-PAUL (RESEDH/RNDDH)
Saint-Pierre BEAUBRUN, PORT-AU-PRINCE
Pascal METELLUS
Jean Joseph Alfred GIBBS
Vilès ALIZAR
Benadieu AUGUSTIN
Vana CHARLES JEAN, SUD-EST
Wilda PYRAM (FLORE DES FEMMES, CAYES JACMEL)
Cenise ACINTHE (GARR/THOMASSIQUE)
Ilrick MARCELIN (CFEDEC, LA VICTOIRE)
Marie Isnise ROMELUS, JACMEL
Louna FRANCOIS, PORT-AU-PRINCE
Patrick Saintil(KODESS, JACMEL
Edex Paul (CFEDEC, LA VICTOIRE)
La Rédaction
Contact : actualites@haitinews2000.com
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