Haïti : La santé mentale des policiers, un enjeu oublié dans la lutte contre les gangs

La guerre contre les gangs qui terrorisent Haïti n’est pas qu’une affaire de fusils et de munitions. Elle se joue aussi dans les esprits des policiers, en première ligne de cette violence quotidienne. Mais dans un pays rongé par l’insécurité et la défaillance des institutions, qui se soucie de leur santé mentale ?
Chaque jour, les policiers haïtiens sont confrontés à des scènes d’une violence inouïe : collègues abattus, civils massacrés, zones entières tombant sous le contrôle des gangs. Pour beaucoup, chaque mission est une plongée dans l’horreur.
« On est là pour protéger les autres, mais qui nous protège, nous ? », se demande un policier affecté à un poste dans une zone à haut risque. Certains avouent être hantés par les actions qu’ils ont dû poser, comme tirer sur des individus armés ou déjouer des enlèvements sanglants.
Ces expériences laissent des cicatrices invisibles mais profondes. Sans soutien psychologique, ces traumatismes non traités s’accumulent, menaçant leur équilibre mental.
Un vide dans l’accompagnement
Alors que le stress post-traumatique est reconnu dans le monde entier comme un problème majeur pour les forces de l’ordre, en Haïti, il est largement ignoré. Les policiers haïtiens ne bénéficient ni de séances régulières avec des psychologues, ni de programmes de gestion du stress ou de débriefing après des interventions critiques.
Les quelques psychologues affectés à la Police Nationale d’Haïti (PNH) sont débordés et manquent de moyens. Ils ne peuvent intervenir qu’occasionnellement, souvent en cas de crises aiguës, comme un suicide ou une tentative de désertion.
Une spirale destructrice
Cette absence de soutien a des conséquences dévastatrices. Beaucoup de policiers souffrent en silence, développant des symptômes de stress post-traumatique : cauchemars, insomnie, hypervigilance, ou encore une perte totale de motivation. Certains sombrent dans l’alcool ou les drogues pour échapper à leur réalité, tandis que d’autres deviennent eux-mêmes violents, envers leurs proches ou envers la population.
La santé mentale des policiers ne concerne pas seulement les individus eux-mêmes ; elle est également essentielle pour la sécurité publique. Un policier traumatisé ou mentalement épuisé peut devenir un danger pour la population. Les bavures, réactions disproportionnées ou décisions impulsives sont souvent le résultat d’un stress non géré.
Dans un contexte où la population haïtienne est déjà méfiante envers les forces de l’ordre, cette situation ne fait qu’aggraver la fracture entre policiers et citoyens.
Journaliste
Analyste Politique
Entrepreneur
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