Kenscoff : les gangs chassent les agriculteurs, les marchés de Port-au-Prince en crise

Les pentes verdoyantes de Kenscoff, jadis considérées comme le grenier de la région métropolitaine, sont aujourd’hui le théâtre d’un drame silencieux. Des groupes armés y imposent leur loi, forçant des dizaines d’agriculteurs à abandonner leurs terres. Résultat : une pénurie de produits frais à Port-au-Prince et une flambée des prix sur les marchés populaires.

Depuis plusieurs semaines, les témoignages s’accumulent. Des cultivateurs, craignant pour leur vie, désertent leurs exploitations. Leurs champs de cresson, de poireau, de chou et de carotte sont laissés à l’abandon, alors que les récoltes étaient en pleine saison. Cette situation affecte directement la chaîne de distribution jusqu’aux marchés urbains.

Mimose, une Madan Sara de 38 ans, vend ses produits au marché de Tête de l’Eau à Pétion-Ville depuis 2021. Aujourd’hui, elle peine à remplir son étal.

« Avant, j’avais des sacs pleins de légumes venant de Kenscoff. Maintenant, je dois chercher ailleurs, mais c’est plus cher et moins bon », confie-t-elle, visiblement inquiète. Elle dit avoir vu tripler le prix du chou en l’espace de deux semaines.

Cette crise met à nu la fragilité du système d’approvisionnement alimentaire du pays, fortement dépendant de zones rurales désormais sous la menace directe des gangs. Les transporteurs refusent de s’aventurer sur certaines routes, craignant les embuscades. Les quelques produits qui atteignent la capitale sont rares et vendus à prix d’or.

Les autorités locales semblent dépassées. Aucune opération de sécurisation durable n’a été engagée dans la zone de Kenscoff, malgré les alertes lancées par les syndicats agricoles et les associations de commerçants.

Si rien n’est fait, préviennent des experts, la crise alimentaire pourrait s’aggraver dans les semaines à venir. Et pour des milliers de familles, manger sainement deviendra un luxe de plus en plus inabordable.

La Rédaction

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