En désaccord avec Trump sur la Syrie, le chef du Pentagone claque la porte
Alors que les États-Unis prévoient le retrait de leurs troupes de Syrie et d’Afghanistan, Jim Mattis, en désaccord avec cette stratégie, a annoncé sa démission.
Le chef du Pentagone Jim Mattis a brutalement annoncé jeudi sa démission du gouvernement de Donald Trump, affichant son désaccord avec la nouvelle stratégie de la Maison-Blanche marquée par le retrait des troupes de Syrie et la préparation d’un désengagement partiel d’Afghanistan. La démission de Jim Mattis, homme respecté sur la scène internationale qui incarnait une forme de stabilité au sein d’une administration traversée de secousses, est un camouflet pour le tempétueux président des États-Unis, qui apparaît de plus en plus isolé.
Dans un courrier adressé au locataire de la Maison-Blanche, cet ex-général des marines de 68 ans, qui entretenait des relations difficiles avec Donald Trump depuis plusieurs mois, insiste sur la nécessité pour les États-Unis de « traiter les alliés avec respect ». Ce faisant, il marque implicitement son désaccord avec un président qui a pris pour cible un à un au cours des derniers mois les dirigeants des principales puissances occidentales. « Je pense que me retirer est la bonne chose à faire », ajoute-t-il dans ce courrier qui a fait l’effet d’un véritable coup de tonnerre à Washington.
« C’est un jour très triste pour notre pays »
Dans sa lettre, le ministre démissionnaire n’évoque pas directement le dossier syrien, si ce n’est pour citer la coalition internationale contre les djihadistes du groupe État islamique (EI) comme exemple de l’utilité des alliances. Mais il sait que son départ sera interprété comme la marque de son clair désaccord avec Donald Trump, qui a annoncé mercredi le départ le plus rapide possible des quelque 2 000 soldats américains stationnés en Syrie. D’autant que l’administration Trump prépare également un retrait « important » des troupes stationnées en Afghanistan a indiqué jeudi soir à l’Agence France-Presse, sous le couvert de l’anonymat, un responsable américain. Or, Jim Mattis avait plaidé et obtenu l’an dernier une augmentation des troupes. Le Wall Street Journal et le New York Times évoquent le départ de la moitié des 14 000 militaires américains engagés sur le sol afghan dans ce conflit vieux de 17 ans lancé après les attentats du 11 Septembre 2001.
À l’unisson, des élus des deux bords politiques ont exprimé leur déception, voire leur inquiétude. « C’est un jour très triste pour notre pays », a lancé Nancy Pelosi, cheffe des démocrates à la Chambre des représentants. En écho, Chuck Schumer, chef de la minorité démocrate au Sénat, a déploré le départ de l’un des « rares symboles de force et de stabilité » au sein de l’équipe au pouvoir. Dans un communiqué cinglant, le républicain Marco Rubio a jugé, à la lecture de la missive, que les États-Unis s’engageaient vers « une série de graves erreurs politiques » qui pourraient abîmer durablement leurs alliances.
Une vieille promesse
Sur Twitter, Donald Trump n’a pas parlé de démission, indiquant simplement que Jim Mattis quitterait ses fonctions fin février et qu’il nommerait un successeur prochainement. Martelant que les États-Unis n’avaient pas vocation à être le « gendarme du Moyen-Orient », Donald Trump a défendu jeudi avec force le retrait de Syrie, une décision prise contre l’avis de plusieurs membres de son administration. Si des questions restent en suspens sur le devenir des frappes aériennes américaines contre l’EI, sur la politique de Washington vis-à-vis de l’Iran dans la région ou encore sur une décision qui laisse le champ libre à la Russie, le président républicain peut se targuer de tenir une vieille promesse. « Il est temps que d’autres se battent enfin », a-t-il lancé sur Twitter, estimant que l’Amérique n’avait « RIEN » obtenu d’autre que la perte de vies précieuses et de milliers de milliards de dollars, et invitant « la Russie, l’Iran, la Syrie et beaucoup d’autres » à prendre le relais contre l’EI, dont il avait clamé la veille la défaite.
Son homologue russe Vladimir Poutine, à la manœuvre en Syrie au côté du régime de Bachar el-Assad, a salué une décision « juste ». « Donald a raison », « nous avons porté des coups sérieux à l’EI en Syrie », a-t-il lancé. L’EI a vu son « califat » autoproclamé se réduire comme peau de chagrin face à de multiples offensives, après une montée en puissance fulgurante en 2014. Mais l’organisation conserve quelques réduits et reste redoutable en raison de sa capacité à mener des attentats meurtriers à travers le monde.
La Rédaction
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