Toussaint Breda, un habitant nègre propulsé chef militaire d’esclaves insurgés

Toussaint Breda, un habitant nègre propulsé chef militaire d’esclaves insurgés

La première partie de l’existence de Toussaint appartient en grande partie à la mythologie. Il serait né esclave à Saint-Domingue au début des années 1740 et non libre en Afrique car Toussaint occupait des fonctions de domestique très certainement de cocher, une faveur qui n’était réservée qu’aux créoles3. On raconte au sujet de ses origines, qu’il aurait été le fils d’un prince africain arada (actuel Bénin). Cette rumeur circulait de son vivant.

L’historien français du XIXe siècle Antoine Marie Thérèse Métral rapporte qu’ « en l’an X, quand la perte de Toussaint Louverture fut jurée, on lui reprocha dans les journaux, d’être le descendant d’un roi d’Afrique (voyez les journaux de vendémiaire et de brumaire de ce temps) »4. Selon l’historien M. Bernard Gainot, dans son cours magistral enseigné à La Sorbonne, ce mythe d’une ascendance royale trouve peut-être son origine dans le fait que Toussaint Louverture savait lire et écrire, que cela impressionnait énormément ses congénères. Toussaint pourtant, n’a été alphabétisé que tardivement, puisqu’en 1779, il déclarait dans un acte, ne savoir « ni signer, ni écrire »5. Son éducation lettrée a donc été indépendante de ses origines familiales.

Toussaint a servi comme esclave sur l’habitation Breda, située sur le Haut du Cap au nord de l’île. Il était le protéger du gérant Bayon de Libertat, qui lui aurait accordé une « liberté de savane », en d’autres termes il bénéficiait de la liberté de mouvements sans l’affranchissement3. Selon les historiens Menier, Debine et Fouchard, son affranchissement se serait produit en 17766. Mais cette date est ambiguë car basée sur un acte où il est question d’un autre affranchi : on ne sait pas donc pas si la date indiquée le concerne à proprement dit. De ce fait, s’il est certain qu’en 1776 Toussaint était totalement libre, il est probable que son affranchissement ait remonté à la fin des années 1760 ou au début des années 1770. Une fois affranchi Toussaint a pris comme patronyme « Breda », le nom de l’habitation dont il avait été l’esclave. En 1779, on retrouve Toussaint Breda à la tête d’une habitation produisant du café et comportant 13 esclaves au Petit-Cormier7.

Toussaint Breda faisait ainsi partie des esclaves nègres à avoir bénéficié sous l’Ancien régime d’une ascension sociale. Sa situation à l’aube de la Révolution française était donc très confortable pour un nègre des colonies. Or la Révolution française menaçait l’ordre socio-économique dont il était un des bénéficiaires.

Le double jeu dans la révolte des esclaves du Nord en 1791

Quel rôle donc, Toussaint Bréda a-t-il joué dans la révolte des esclaves du Nord en 1791 ? Deux courants historiographiques existent sur cette question.

Le plus important courant le présente comme l’un des instigateurs fondamentaux de l’insurrection8. L’historien haïtien du XIXe siècle Céligny Ardouin rapporte à partir de témoignages d’anciens vétérans, que Toussaint Bréda aurait été contacté par les royalistes pour fomenter l’insurrection. Les royalistes cherchaient par ce biais, à porter atteinte au mouvement des patriotes autonomistes, c’est-à-dire aux petits blancs. Mais pourquoi alors, une fois l’insurrection lancée, la première réaction de Toussaint Bréda a-t-elle été de mettre à l’abri son ancien maître Bayon de Libertat ? Nous pouvons concevoir deux hypothèses. La première est qu’il n’aurait pas envisagé que le mouvement puisse se retourner contre les grands blancs. La seconde est qu’il ne serait tout simplement pas l’un des fomenteurs de l’insurrection.




Ce qui nous amène au deuxième courant animé par M. Pierre Pluchon9. Pour lui, Toussaint Breda n’était pas forcément en phase avec ce mouvement insurrectionnel qui le menaçait d’un double tranchant : en tant que maître d’esclaves et de biens, il pouvait être la proie des insurgés ; dans la confusion des représailles quasi-imminentes des Blancs, il pouvait facilement être une victime de la répression. Avec une certaine habilité donc, Toussaint Bréda aurait adopté un double jeu. D’une part, en mettant à l’abris son ancien maître Bayon de Libertat, Toussaint se serait assuré d’avoir un protecteur influent auprès des autorités coloniales. D’autre part, en approchant les insurgés, en tant que médecin grâce à sa connaissance des plantes, il se serait assuré la protection de ses biens. Ce n’est peut-être qu’a posteriori, que ce double jeu lui aurait permis de s’ériger en intermédiaire entre les royalistes et les insurgés, puisque sa personne, connue des autorités à travers Bayon de Libertat, aurait été en mesure d’apporter une certaine honorabilité au mouvement. Ainsi, on note qu’il est un des signataires le 4 décembre 1791, de l’adresse à l’Assemblée coloniale, proposant en vain, une amnistie générale, avec les deux meneurs de l’insurrection Jean-François et Biassou10. L’enlisement marqué par l’extension du mouvement et la relative paralysie des propriétaires européens et mulâtres l’aurait poussé à s’impliquer davantage dans l’insurrection, dans le but de canaliser les insurgés, le transformant ainsi en meneur d’hommes.

Un brillant organisateur militaire : l’avènement de Toussaint Louverture

Toussaint Bréda, en plus d’occuper des fonctions de médecin chez les insurgés, offre ses services de conseiller à Biassou qu’il jugeait plus malléable que Jean-François, le chef suprême11. D’après l’historien M. Bernard Gainot, il lui organise une garde disciplinée à l’européenne qui tranchait avec la totale désorganisation des insurgés. Pour Toussaint, ce aurait été une question de survie : être à la tête d’un mouvement discipliné lui aurait été plus efficace pour protéger sa personne et ses biens qu’être seul face à une horde d’insurgés laissés à eux-mêmes.

Au printemps 1793, les Espagnols offrent aux révoltés, un sanctuaire en même temps que la liberté à ceux qui combattraient pour eux. Toussaint Bréda à la tête de son armée de 3 à 4000 Noirs, est vite remarqué pour ses talents militaires, sa discipline10. Ainsi est-il promu lieutenant-général. Toussaint troque alors son nom Breda pour Louverture, surnom qui, bien que faisant l’objet de spéculations diverses, devait suggérer son habilité à ouvrir une brèche dans les rangs de l’adversaire. Ses qualités militaires le mènent à développer des ambitions politiques.

Source : wikipedia.org


La Rédaction

La Rédaction Contact : actualites@haitinews2000.com

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

This site uses Akismet to reduce spam. Learn how your comment data is processed.

Enable Notifications OK No thanks