La Révolution dominguoise, l’œuvre inachevée de Toussaint Louverture

La Révolution dominguoise, l’œuvre inachevée de Toussaint Louverture

On observe en effet sous le primat de Toussaint Louverture, la restauration de nombreux « symboles » de l’Ancien régime. Toussaint Louverture s’était entouré, d’après l’historien M. Gainot, d’une cour où l’étiquette était de rigueur. Les Blancs étaient nombreux à y participer.

Certaines mesures prises par Toussaint marquent également une restauration des « valeurs morales ». Ainsi est rétablie la pompe de l’Eglise catholique lors de victoires : cette cérémonie d’Ancien régime glorifiant la lutte contre le protestantisme, a été célébrée lors des succès de Toussaint contre les Anglais. Le divorce légalisé sous la Révolution, est supprimé avec Toussaint. Les émigrés, ces planteurs blancs ayant fui la Révolution, sont rappelés afin, assurait Toussaint, de bénéficier de leurs compétences techniques.

Dès 1795, Toussaint Louverture se montre très actif pour obliger les anciens esclaves non engagés dans l’armée à reprendre le travail. Ce qui provoque des soulèvements, les cultivateurs y voyant une forme de rétablissement de l’esclavage. Toussaint a alors utilisé ses troupes disciplinées d’anciens esclaves pour mater ces révoltes18. Les habitations ont été placées sous administration militaire : les officiers de Toussaint, comme Jean-Jacques Dessalines ou Henri Christophe ont appliqué de manière militaire les « règlements de culture ». Désormais à Saint-Domingue deux entités existent : celle des militaires et celle des cultivateurs, assignés sur leurs anciennes habitations19. Cette forme de servage a été qualifiée par les historiens de « caporalisme agraire ».

Enfin sous son primat est réalisée une vieille revendication coloniale : l’accession à l’autonomie de la colonie. A la suite du coup d’Etat de Bonaparte, le régime d’isonomie républicaine des colonies a été supprimé. Les colonies ont été placées sous un régime d’exception. Toussaint informé de cette mesure, s’est attelé de son propre chef à l’élaboration d’une constitution, celle du 8 juillet 1801, autonomiste et autocratique. Elle est inspirée de la constitution de l’an VIII, notamment pour la prééminence de l’exécutif et du militaire. Cette constitution le nomme gouverneur à vie, elle consacre le catholicisme comme religion d’Etat, et si elle reconnaît la liberté générale en l’absolue, elle envisage à terme la possibilité de recourir de nouveau à une main-d’œuvre africaine. Enfin, cette constitution institutionnalise les « règlements de culture ».

C’était sans compter sur Bonaparte qui, en mars 1801, apprenant la prise de possession de la partie espagnole – lui qui œuvrait pour une réconciliation franco-espagnole -, était entré dans une grande colère qui a joué pour beaucoup dans la disgrâce de Toussaint Louverture20. Cette constitution était un affront de trop. La réaction du Premier consul de France Napoléon Bonaparte a été l’envoi d’un corps expéditionnaire devant mettre un terme à la révolution dominguoise.

Une chute provoquée par la métropole

Acte écrit de Toussaint Louverture contre l’insurrection de 1801.

La France en octobre 1801, entre enfin en paix avec la Grande-Bretagne, une expédition à Saint-Domingue est ainsi rendue possible. Un corps expéditionnaire est donc formé et placé sous le commandement du général Leclerc. Il comporte des officiers issus des colonies comme Rochambeau, ou encore des officiers de couleur défaits par Toussaint Louverture (Rigaud, Pétion, Villatte). L’expédition Leclerc quitte la France en décembre 1801 avec 17 000 hommes, renforcée entre mars et mai 1802 par 6 000 hommes. Toussaint, lui, dispose d’une armée de 20 000 hommes, répartie entre la cavalerie, l’infanterie et le génie. Par ailleurs, sa garde nationale, véritable troupe aguerrie, compte près de 10 000 hommes.

Malgré une supériorité numérique, Toussaint Louverture est vite défait militairement. Toussaint adopte une tactique défensive, pratiquant la stratégie de la terre brûlée. Celle-ci n’arrête pas l’offensive menée dès février 1802 par le corps expéditionnaire. Le général Leclerc avait débuté par un débarquement simultané dans tous les grands ports, suivi d’une offensive pour refouler les rebelles. Les pertes françaises sont importantes mais se soldent par de nombreuses victoires. Si bien que les officiers de Toussaint, à l’exemple de Maurepas ou Henri Christophe, font tout à tour défections. Le 6 mai 1802, Toussaint Louverture est contraint de capituler, puis placé à résidence dans l’île.

Avec la chute de Toussaint Louverture, la Révolution dominguoise connaît un coup d’arrêt. Son objectif aurait été l’instauration d’un nouvel ordre, inspiré à la fois de l’Ancien régime notamment pour l’organisation du travail, et de la Révolution française principalement pour la suppression du préjugé de couleur et la rhétorique idéologique. Trop progressiste pour Bonaparte, trop réactionnaire aux yeux des cultivateurs, le régime de Toussaint Louverture ne satisfait au final personne, à l’exception de la nouvelle élite de militaires de couleur, grande bénéficiaire du nouvel ordre. Lâché par la population après la violente répression menée contre des cultivateurs insurgés dans le Nord, en octobre 1801, Toussaint Louverture est rapidement mis en déroute par l’expédition Leclerc en 1802, malgré une supériorité numérique. C’est au final dans une certaine indifférence que le 7 juin 1802, en dépit des promesses faites en échange de sa reddition, Toussaint Louverture est déporté en France où il meurt de froid le 7 avril 1803 à Fort de Joux. Il faut attendre la Révolution haïtienne pour que l’œuvre amorcée par Toussaint Louverture trouve son achèvement, et l’érige pour la postérité, en héros national.

Source : wikipedia.org


La Rédaction

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